Emotions, Corps et Théâtralité. Contribution à une modélisation de l’expertise quotidienne de l’activité des enseignants en Education Physique et Sportive

Sous la direction de Luc Ria

Soutenance

Le 30 novembre 2009 à Clermont-Ferrand, devant le jury composé de : 

  • Marie-Joseph BIACHE, Professeur des Universités, Université Blaise Pascal Clermont-Ferrand 2
  • Claudine BLANCHARD-LAVILLE, Professeur des Universités, Université Paris X
  • Marc DURAND, Professeur, Université de Genève (Rapporteur)
  • Luc RIA, Professeur des Universités, Université Blaise Pascal Clermont-Ferrand 2 (Directeur de thèse)
  • Jacques SAURY, Professeur des Universités, Université de Nantes
  • Gérard SENSEVY, Professeur des Universités, IUFM de Rennes (Rapporteur)

Résumé


Cette recherche a pour objectif de décrire et d’analyser le rôle des émotions, du corps et de la théâtralité dans l’activité des enseignants experts en Education Physique et Sportive (EPS). En effet, les cours d’EPS se caractérisent par une extrême richesse des interactions entre le professeur et les élèves, débouchant sur des dynamiques émotionnelles variées. Alors que les enseignants novices ont tendance à les subir et à les appréhender, les enseignants plus expérimentés parviennent à les exploiter à des fins éducatives. Comment retiennent-ils l’attention, captivent-ils l’auditoire, incitent-ils les élèves à apprendre ? Comment jouent-ils avec l’ambiance de la classe ? Si cette « maîtrise affective » se traduit le plus souvent dans le langage courant par l’utilisation des termes de « charisme » ou de « présence », notre étude s’attache à déconstruire ces catégories de sens commun et à analyser de manière systématique l’activité ordinaire d’enseignants d’EPS experts.
Cette recherche a été menée en collaboration avec cinq professeurs correspondant aux critères d’expertise de Tochon (1993). Neuf études de cas ont été réalisées avec des classes de collège et de lycée. Concernant le recueil des données, chaque enseignant(e) a été observé(e) dans deux activités sportives et/ou artistiques : en tant que spécialiste, puis de non spécialiste. Les leçons ont été enregistrées sur fichiers vidéo à l’aide d’un micro HF, des entretiens d’autoconfrontation, complétés par une grille d’auto évaluation des émotions ressenties, ont été réalisés avec les enseignants, ainsi que des entretiens semi-directifs avec des élèves à l’issue de certaines leçons. Le traitement des données à partir du cadre théorique et méthodologique du « cours d’action » (Theureau, 2006) a été complété par l’emploi de procédures systématiques d’observation de la communication non verbale (Winkin, 1986) des enseignants lors des interactions scolaires.
Les résultats de la recherche comportent : (a) une analyse locale et globale de huit cas mettant en jeu la dialectique parfois contrastée des impressions explicitées par les enseignants lors des entretiens d’autoconfrontation et les expressions observées d’un point de vue extrinsèque. Ces données permettent de comprendre le jeu émotionnel qui se déploie en cours d’EPS ; (b) une modélisation de l’activité ordinaire des enseignants experts mettant en évidence les éléments de généralité dans leurs dispositions à agir devant les élèves, qui participent à la stabilité, à l’adaptabilité et à la flexibilité de leur activité professionnelle en situation.
La discussion de la recherche souligne l’importance de la description et de l’analyse de cette dimension cachée de l’expertise, mais également d’une déconstruction de l’activité de ces professeurs pour en comprendre le sens, ses ancrages culturels, et ses impacts sur les élèves. En particulier, elle plaide en faveur d’une conception incorporée, située et distribuée de l’expertise des enseignants. Elle insiste également sur les dimensions transformatives effectives pour les professeurs ayant participé à l’étude, et sur les dimensions transformatives potentielles pour la formation initiale ou continue des enseignants d’EPS.