Le panthéon des élèves de Troisième

Ce travail étudie la mémoire historique des élèves de Troisième. Nous cherchons à faire émerger, à travers les personnages qu’ils connaissent et ceux auxquels ils affirment s’identifier, les valeurs qu’ils projettent sur le passé ainsi que le sens moral qu’ils attribuent à l’histoire.

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Ce travail de recherche vise à saisir la nature des représentations que les élèves de troisième (fin du cycle commun de connaissances, de compétences et de culture) se font du passé. Nous ne leur demandons cependant pas ici de « raconter l’histoire de la France », comme ont pu le faire Lantheaume et Létourneau (2016). Il s’agit pour nous de prendre appui sur les figures historiques qu’ils connaissent (et plus particulièrement, celles auxquelles ils disent préférer d’identifier), afin de faire émerger leur panthéon imaginaire, et à travers lui le sens qu’ils donnent à l’histoire, c’est-à-dire notamment les représentations et valeurs qu’ils projettent sur le passé. Nous considérons en effet, comme les autrices de l’ouvrage Analyser les représentations sexuées dans les manuels scolaires (2005), que les représentations « s’incarnent dans le personnage, élément-clé des écrits pour la jeunesse, quels qu’ils soient. »

Cette recherche repose d’abord sur l’analyse de questionnaires qui ont été réalisés par environ 200 élèves de Troisième, scolarisés dans 4 collèges de la ville de Clermont Ferrand, dont 2 sont classés en REP. Ces questionnaires ont été complétés par des entretiens semi-directifs menés auprès d’une partie des élèves, mais aussi auprès de leurs enseignants d’histoire-géographie de cette année mais aussi parfois, des enseignants des années antérieures, ou encore des enseignants de langue.

La dimension genrée est centrale dans ce travail. Nous cherchons d’abord à déceler si, de même que les élèves portent un récit historique national largement commun (Lantheaume et Létourneau, 2016), il n’existerait pas également une forme de « roman des femmes » : un récit partagé, forcément très parcellaire et articulé autour de la mémoire de quelques gestes féminines, qui à la fois donnerait un sens au passé, et éclairerait (ou non) l’avenir, par les valeurs qu’il porte ainsi que par les possibles qu’il ouvre.

Nous cherchons également à mesurer quelles sont les origines de ces connaissances biographiques des élèves, afin de faire la part des cours d’histoire, des cours des autres disciplines, et du milieu extra-scolaire. La question est de savoir si les cours d’histoire, qui ont depuis longtemps tourné le dos à une histoire héroïque (sans cependant renoncer à transmettre un récit incarné dans des acteurs), fournissent ou non aux élèves des figures d’identification, propres à nourrir leur réflexion sociale et à développer leur agentivité.
Enfin, nous interrogeons spécifiquement la question de l’adhésion (ou non) à un roman national intégrateur et porteur de valeurs républicaines et universalistes, plus particulièrement dans les deux collèges REP que nous étudions, qui se situent dans des quartiers qui ont pu être associés à un « apartheid territorial » par les discours politiques.