HDR Dacia Dressen-Hammouda

Pour une approche de rédactologie en langues de spécialité : Une didactique de l’écrit ciblée sur les besoins contextuels de l’apprenant L2

 

SOUTENANCE

Le 27 novembre 2014 à l’Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3, devant un Jury composé de :
 
  • Jean-Claude BERTIN, Professeur des Universités, Université du Havre
  • Shirley CARTER-THOMAS, Professeure, Institut des Mines-Télécom
  • Thierry CHANIER, Professeur des Universités, Université Blaise Pascal Clermont 2
  • Isabelle DELCAMBRE, Professeure émérite,Université de Lille 3
  • John HUMBLEY, Professeur des Universités, Université Paris Diderot – Paris 7
  • Jean-Paul NARCY-COMBES, Professeur émérite, Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3



RÉSUMÉ

Ce mémoire de synthèse en vue de l’obtention de l’habilitation à diriger les recherches s’inscrit dans une double optique : la didactique des langues étrangères (notamment de l’anglais) et la rédactologie. Moins connue que la didactique de l’écrit, la rédactologie (Sionis 2002) s’en distingue de deux manières : (1) son objet d’étude concerne l’écrit et les pratiques d’écriture d’adultes dans des contextes spécialisés (ex. monde de l’entreprise, université, industrie, sciences) ; (2) les résultats de la recherche sont réinjectés directement dans la pédagogie de l’écrit, étant ainsi validés ou réfutés. La rédactologie L2 est une recherche appliquée, qui entretient un dialogue dynamique entre résultats scientifiques et pertinence des résultats pour l’apprentissage de l’écrit spécialisé par des apprenants adultes de langue seconde (L2), surtout l’anglais. Ailleurs (par exemple au Royaume-Uni, en Amérique du Nord, en Australie) la rédactologie vise l’écrit spécialisé et les pratiques d’écriture des locuteurs langue maternelle de l’anglais.

La rédactologie L2 se trouve à la croisée de plusieurs champs d’investigation : la linguistique (analyse du discours et analyse de corpus), la linguistique anthropologique et l’ethnographie, la didactique des langues étrangères, les langues de spécialité et les LANSAD (langues pour les spécialistes d’autres disciplines), et les littéracies universitaires (ex. I. Delcambre, D. Lahanier-Reuter, F. Boch). L’intérêt pour une telle approche se révèle par sa contribution aux enjeux sociétaux actuels, par rapport au taux d’échec élevé en licence. En effet, l’écrit est peu enseigné à l’université française, et ce rarement de manière appliquée aux besoins situés des apprenants. De plus, la didactique de l’écrit est quasiment absente du paysage universitaire, alors que les écrits que rencontrent les étudiants en licence, en master, en doctorat ainsi que dans le monde professionnel, sont très différents des formes et des pratiques d’écriture apprises dans le secondaire. Les mêmes besoins de contextualisation de l’écrit spécialisé existent pour des apprenants de langues étrangères. Toutefois, son apprentissage passe très souvent par l’enseignement de la traduction, en dépit du fait que la maîtrise de l’écrit spécialisé constitue une compétence spécifique, distincte des compétences en traduction ou en langue orale.

Ce mémoire de synthèse apporte un début de réponse à cette problématique, en proposant un modèle qui décrit les conditions de l’émergence de la maîtrise de l’écrit spécialisé. Ce modèle est appliqué à trois domaines très différents : la géologie de terrain, la conception de l’information, et la communication interculturelle. Les résultats d’analyse obtenus pour chaque domaine sont décrits et commentés.

Le cœur du modèle repose sur un concept en linguistique anthropologique. Il s’agit de l’indexicalité, qui décrit l’interaction subtile qui est entretenue entre ce qui est exprimé explicitement, et ce qui n’est que ‘suggéré’. En effet, des signes ou des indices – c’est à dire, des marqueurs dans la langue écrite ou orale, dans les gestes, les comportements, ou les atttitudes – indiquent des informations importantes aux initiés du domaine. Ces informations restent souvent inaccessibles aux apprenants. Les non-dits de l’écrit font partie des compétences qui construisent l’expertise, mais se transmettent le plus souvent par une « pédagogie invisible ». Ils constituent ainsi une entrave importante à la construction de l’expertise à l’écrit. Les identifier et définir une pédagogie de ces signes invisibles constituent l’enjeu de ce travail.